Transcription podcast : Les mutualités

Saviez-vous que les mutualités ont joué un rôle fondateur dans notre sécurité sociale et sont aujourd'hui des acteurs clés pour garantir des soins de santé abordables et accessibles à l'avenir ?

Dans un souci d’accessibilité pour toutes et tous, nous vous proposons ici la transcription complète de cet épisode. Vous pouvez la lire à la place ou en complément de l’écoute audio.

Écoutez l’épisode ici. Retrouvez ci-dessous la version texte intégrale :

[Introduction musicale]

MARIANNE : Elles sont nées bien avant Internet, bien avant les réseaux sociaux et même avant la sécurité sociale. Elles sont un pilier de notre solidarité : ce sont les mutualités. Pourquoi sont elles indispensables? Quelle est leur mission ? Comment évoluent elles ? On en parle dans le podcast des Mutualités libres. 

[Musique]

MARIANNE : Bonjour et bienvenue dans cet épisode du podcast des Mutualités Libres. Aujourd'hui, on va parler du rôle des mutualités et on va déconstruire ensemble quelques idées reçues à leur sujet. Alors restez avec nous pour une discussion passionnante sur leur place dans notre système de santé. 
Et pour en parler aujourd'hui, je reçois deux invités qui vont nous partager leur vision et leur expérience de ce modèle de solidarité. C'est Alex et Xavier. Bonjour à tous les deux. 

XAVIER BRENEZ : Bonjour 
ALEX PARISEL : Bonjour

MARIANNE : Alex Parisel, tu es le patron de Partenamut, Mutualité Libre et Xavier Brenez, tu diriges les Mutualités libres dont Partenamut fait partie. Alors je vais commencer avec toi, Xavier. J'ai d'abord une première question : les premières mutualités, elles ont émergé fin du dix-neuvième. C'était un peu le moment où les ouvriers voulaient se protéger de façon collective par rapport aux accidents et aux maladies. On était quand même dans des conditions difficiles de travail. Est ce que c'est là l'origine des mutuelles? 

XAVIER BRENEZ : Oui et non, parce qu'en fait, on a des traces de mutuelles qui ne s'appelaient pas comme ça au Moyen Âge. Mais les mutuelles telles qu'on les connaît aujourd'hui, en tout cas leurs bases, ont été créées autour de la révolution industrielle. Et le mécanisme est toujours le même : c'est une association spontanée de personnes qui décident de créer un système de solidarité entre eux pour se couvrir contre des risques de santé. Et ça, c'est vraiment la base. Elles définissaient, et c'est encore le cas aujourd'hui, la cotisation et la couverture qui étaient associées. Et donc dans l'histoire des mutualités, on a trois grands piliers dans lesquels les mutualités ont été créées : le pilier chrétien, le pilier socialiste et notre pilier. On s'appelait les Mutualités Professionnelles, maintenant les Mutualités Libres : les mutualités qui étaient créées dans des sociétés ou dans des corporations avec un caractère apolitique et indépendant de toute idéologie. Et c’est ce que l’on a encore aujourd'hui. Et puis, évidemment, il y a eu beaucoup de mutualités qui ont été créées. C'était des petites structures locales et progressivement elles se sont consolidées et elles ont été encadrées puisqu'elles ont pris une place très importante dans le paysage belge. Donc, il y a vraiment un cadre juridique qui a été créé. Et puis, à la sortie de la Seconde Guerre mondiale, on a créé la sécurité sociale et les mutualités ont eu un rôle très important dans la mise en place d'une couverture universelle. Il faut savoir que partout dans le monde, c'est le combat des mutualités. Elles sont “assureur social” à la base, mais elles ont toujours plaidé pour un accès universel aux soins et une couverture pour tous. Donc en Belgique, les mutualités ont joué un rôle très important et c'est pour ça qu'aujourd'hui, elles ont aussi un rôle très important dans l'assurance maladie-invalidité qui a été créée à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. 

MARIANNE : Quand tu parles en général des mutualités, tu parles de deux missions bien spécifiques. De quelles missions s'agit-il ? 

XAVIER BRENEZ : Donc évidemment, il y a le rôle historique d'assureur social qu'on a toujours, avec des assurances complémentaires. Dans le cadre de l'assurance obligatoire, l'assurance maladie-invalidité, on a une double casquette : on est cogestionnaires, c'est à dire qu'on co-définir l'évolution du régime, les remboursements, les droits, de manière à veiller effectivement à ce que les risques de santé soient les mieux couverts. Et on a un rôle d'opérateur, c'est-à-dire que l'Etat nous délègue des tâches qui sont d'assurer les remboursements, d'octroyer les droits, d'accompagner les personnes en incapacité de travail par exemple. Donc ça, ce sont les deux rôles que nous avons dans le cadre de l'assurance obligatoire. 

MARIANNE : Et est-ce que, Alex, tu te reconnais dans les deux missions dont on parle en tant que patron de Partenamut ? Est ce que tu peux nous parler un peu des missions qui sont plus connues des mutualités et celles aussi qui sont un peu moins connues ? 

ALEX PARISEL : Donc comme l'a dit Xavier, c'est d'abord des associations de personnes qui, au fil du temps aujourd'hui, sont inscrites comme organisations privées dans la loi, avec trois mandats effectivement : le mandat de gérer l'assurance obligatoire, donc s'assurer que les droits et les devoirs sont bien garantis dans le cadre de l'assurance obligatoire, offrir un mandat plus privé qui est d'assurer et d'offrir une assurance complémentaire, voire des assurances facultatives de type hospitalisation ou soins dentaires, et il y a un troisième mandat légal qui est d'informer, de faire de la prévention et d'assister. Et donc les mutualités ont un rôle qui est d'accompagner les personnes lors des aléas de la vie, de manière très concrète à leurs côtés. Et on aura probablement l'occasion d'en rediscuter, parce qu'au delà du remboursement et des revenus de remplacement, la mutualité agit aux côtés des gens de manière très concrète tout au long de la vie. 

MARIANNE : C'est vrai, qu'à tort, on pense souvent que la mutualité va juste rembourser nos prestations de soins, nos médicaments ou fournir des allocations d'indemnités. Mais c'est vrai que c'est beaucoup plus que ça. 

ALEX PARISEL : C'est beaucoup plus que ça, mais ça part de là. Donc c'est vraiment le cœur de métier. Mais ce cœur aujourd'hui, il n'est pas suffisant. Parce que la santé, ce n'est pas simplement qu'une question d'accessibilité financière, c'est beaucoup plus large que ça. 

MARIANNE : On a aujourd'hui, dans le secteur mutualiste, cinq grands acteurs. C'est d'ailleurs un peu une critique du monde politique qui dit qu'il y a trop de mutualités en Belgique. Pourquoi il y en a autant, Xavier ?

XAVIER BRENEZ : Comme je le disais, il y a une raison historique. C'était des structures locales, à la base, qui se sont vraiment consolidées. Il faut voir que maintenant on a une situation qui est complètement différente : on est parti d'un système où il y avait plusieurs milliers de mutualités très petites. Quand on fait un saut dans le temps, on est dans les années 80, il y avait un peu plus de 100 mutualités. Il y a dix ans, il y avait une quarantaine de mutualités et, aujourd'hui, suite aux fusions des dernières années, on est plus ou moins à 20 mutualités qui sont réparties dans les cinq familles. Donc il y a une grande consolidation qui a été faite. Pourquoi ? Parce que la complexité augmente, les investissements doivent être réalisés et donc on veut effectivement faire en sorte d'avoir une taille nécessaire pour offrir tous les services qui sont demandés par nos affiliés. Est-ce qu'on est au bout de la consolidation ? En tout cas, certaines familles sont au bout. Nous, on a trois mutualités, on ne peut pas aller plus loin. Certaines autres organisations peuvent encore fusionner et donc on pourrait arriver dans les prochaines années à quelque chose qui tourne autour de douze mutualités pour l'ensemble du pays. Mais on arrivera à la fin du système. 

MARIANNE : Et ces regroupements, c'est vrai qu'ils sont pas mal intéressants. Ils permettent sûrement d'avoir des synergies. Mais pourquoi c'est aussi intéressant d'avoir une pluralité d'acteurs ? Et là je vais me tourner plutôt vers Alex. 

ALEX PARISEL : Donc cette pluralité, elle vient de l'histoire de l'ADN de chaque mutualité, de son parcours, des valeurs qu'elle défend, des choix qu'elle a fait, par exemple, de développer certains types de services plus que d'autres. Certaines sont plus digitales, d'autres ont un écosystème, donc un réseau de partenaires qui est très développé vis-à-vis de la genèse, d'autres vis à vis des aînés. Certaines favorisent un prix de cotisation plus faible. Donc ça permet en fait, de manière assez démocratique, à chaque citoyen, à chaque résident en Belgique, d'avoir le choix en fonction de ses besoins, de ses attentes, de ses valeurs, de la mutualité qu'il veut rejoindre. Et donc, le second avantage de cette pluralité, c'est qu'il y a des positionnements différents pour toutes les raisons historiques d'ADN, de valeurs, de développement d'offres, de services ou de produits, qui créent un environnement de concurrence. Concurrence qui est, en Belgique, extrêmement régulée et donc saine. Et cette concurrence amène à de l'innovation. L'innovation dans les services, dans les produits, par exemple, on a mis sur le marché la garde d'enfants malades, les soins urgents à l'étranger. Et parfois même ces innovations qui se trouvent dans l'assurance complémentaire, sont reprises dans l'assurance obligatoire. Donc cette pluralité a beaucoup de valeur pour le citoyen. 

MARIANNE : Il y a encore une critique quand même qui persiste sur cette pluralité et il y en a même qui voudraient supprimer les mutuelles. Donc à ceux qui disent “Supprimons les mutualités”, qu'est-ce que tu réponds, Xavier ? 

XAVIER BRENEZ : C'est vrai qu'on entend ça surtout de certains de certains partis. Alors je ne sais jamais si c'est par calcul politique ou par méconnaissance de la réalité du secteur des soins de santé. En tout cas, honnêtement, il n'y a aucune raison objective de vouloir supprimer les mutualités. Elles ont un rôle essentiel pour tout le secteur des soins de santé. On a déjà illustré certains éléments mais on voit aussi que la satisfaction des affiliés est très élevée par rapport aux services qui sont offerts, que les mutualités, par rapport à d'autres organismes, bénéficient d'un taux de confiance de la part de la population. Alors on critique, on dit : “oui, il y a plusieurs mutualités, donc ça coûte cher”. Bien non, parce que quand on se compare à d'autres pays sur, je dirais, le coût administratif de la santé, on va dire ça, on est même en dessous de la moyenne européenne, en ayant un système qui repose sur plusieurs acteurs. Et donc on voit que dans d'autres pays, quand il y a un seul acteur, une administration, il y a même des cas où c'est beaucoup plus cher. Donc je trouve qu'il y a très, très peu d'éléments objectifs. Et il ne faut pas oublier que le grand rêve de la rigueur, centraliser tout ça dans une administration, ça nous mènerait dans une opération gigantesque … 

MARIANNE : Un grand chantier … 

XAVIER BRENEZ : Plusieurs années sans valeur ajoutée. Et c'est ce qu'il faut éviter. En Belgique, on a plusieurs exemples. Par exemple, les réformes de l'État où on change des choses sans valeur ajoutée. Donc pourquoi abolir ou changer des choses qui fonctionnent ? Je pense qu'on a vraiment assez de chantiers au niveau des soins de santé pour s'occuper vraiment des choses qui ne fonctionnent pas. Maintenant, le fait qu'il y ait plusieurs acteurs, ça ne nous empêche pas d'avoir des synergies. Il faut savoir qu'au niveau informatique par exemple, on a des projets intermutualistes, communs à toutes les mutualités. Nous-mêmes, nous avons une infrastructure informatique qui est commune à trois organismes assureurs. Et au delà de l'informatique, on collabore aussi, même si on est concurrents sur les services, on collabore sur les positions à prendre et les évolutions qui devraient voir le jour au niveau du régime. Donc aujourd'hui, cette concurrence, elle est salutaire, elle n'est pas du tout problématique au niveau du secteur. 

MARIANNE : Et dans ces projets communs, il y a aussi des projets de prévention. Je pense, par exemple, aux conseillers santé qui passent des coups de fil aux personnes les plus vulnérables sur divers sujets de santé, comme la solitude pendant la Covid, par exemple, ou la prévention liée aux cancers. Cette prévention, on dit souvent que 1 € investi c'est 4 € d'économisés en coûts de réparation. Mieux vaut prévenir que guérir. Comment est-ce que les mutualités concrétisent ce rôle lié à la prévention ? 

ALEX PARISEL : La prévention, effectivement, un investissement extrêmement intéressant dans la santé et c'est un sous-investissement en Belgique. La prévention, c'est aussi un mécanisme qui est assez complexe et qui nécessite une multitude d'acteurs pour faire passer des messages, puisqu'il s'agit à un moment donné que le patient ou la personne ajuste, adopte, change son comportement en fonction d'une information claire, scientifique, validée et qu'elle puisse faire ses choix en toute liberté. On parle évidemment de mieux manger, mieux bouger, se faire vacciner, se faire dépister. Tous ces éléments-là sont des éléments de prévention et il y a toute une série d'acteurs autour de la prévention, dont le corps médical, les aidants-proches et les mutualités. Les mutualités ont plusieurs atouts. Elles ont en fait quatre grands atouts. Le premier, c'est que, comme l'a dit Xavier, on est un acteur de confiance et on diffuse de l'information scientifiquement validée. On l'a vu à quel point c'était apprécié et important lors de la crise du Covid. Le deuxième atout, c'est que tous les résidents en Belgique, tous les citoyens belges sont affiliés à une mutualité et que, par la multiplicité des canaux de communication que nous avons, que ce soit par l'écrit, les brochures ou les magazines, que ce soit par le digital, par les podcasts et les newsletters, ou que ce soit par la rencontre physique en agence ou dans ce qu'on appelle les relais santé, où on fait des activités, des ateliers. Par exemple, le dernier atelier qu'on a fait, c'est “Parlons-en” qui cherche à lever le tabou de la santé mentale auprès des jeunes. Nous avons une capacité de toucher le grand public avec des messages de prévention extrêmement puissants. Et puis le troisième atout, c'est qu'on dispose de données et que si ces données de santé sont utilisées à bon escient dans le cadre légal, avec le consentement quand c'est nécessaire des personnes, on peut envoyer le bon message à la bonne personne au bon moment. Par exemple, vous avez 50 ans, vous recevez une information comme quoi il serait intéressant de se faire dépister pour le cancer colorectal. Vous n'avez pas vu un dentiste au cours des six premiers mois, vous avez droit à une consultation gratuite préventive chez le dentiste. On vous rappelle tout ça : “tiens, ce serait intéressant de faire un rappel de vaccin”. Les mutualités ont la capacité de sensibiliser et donc de prévenir les personnes grâce à l'usage de ces datas. Et puis le quatrième point, ça a déjà été souligné, on a une capacité aussi proactive vis-à-vis de publics plus précarisés qui ne sont pas en contact avec nos agences, qui ne sont pas en contact avec le corps médical. Et se dire “tiens, est-ce qu'on peut vous aider par rapport à la solitude ? On peut vous mettre en contact avec des associations qui mettent en contact des voisins et des voisines”, “tiens, vous êtes une famille monoparentale avec des enfants ...”. Comment est-ce qu'on peut faire valoir vos droits puisqu'en fait, un des gros problèmes de l'accès à la santé, c'est le non-recours aux droits si les gens ne les connaissent pas. La prévention, c'est ça aussi : c'est faire connaître leurs droits aux gens. Et donc voilà quatre atouts que les mutualités ont et qu'elles développent au fil de leurs activités. 

MARIANNE : Et alors un affilié, il a aussi tout un trajet de vie qui, parfois, dérape avec un cancer, une incapacité de travail. Comment est-ce qu'on accompagne les personnes dans ce trajet de vie ?

ALEX PARISEL : Le terme est très juste. C'est un trajet de vie, c'est-à-dire de la naissance jusqu'à la fin de vie, on est affilié à une mutualité et, en tant que mutualité, on accompagne effectivement les personnes lors des aléas de vie. Alors on le fait de deux manières. La première, c'est que quand on a un aléa de vie, un accident, une maladie, on a envie de se concentrer sur sa guérison. Or, le système est quand même très complexe et donc la mutualité est là pour intégrer cette complexité, pour simplifier la santé et de le faire avec le plus d'empathie possible. Et le deuxième service, la deuxième typologie de services qu'on offre, c'est par rapport à la pathologie, par rapport à l'accident, par rapport aux soins, on est à côté de la personne. Par exemple, vous sortez d'une hospitalisation, vous devez retourner à la maison. Peut-être que vous avez besoin d'avoir un kiné, une infirmière, un repas à domicile. Donc, du coup, la mutualité met à disposition un centre de coordination des soins qui va coordonner ça pour vous. Vous allez avoir potentiellement la visite d'une ergothérapeute, si vous devez aménager votre domicile, si vous devez faire des achats pour accueillir une patiente ou si vous êtes un aidant-proche, vous avez besoin d'un lit médicalisé,... La mutualité peut l'offrir sous forme locative pour que le coût ne soit pas trop élevé ou à l'achat. Et donc tout cela permet de faciliter véritablement la guérison, la prise en charge de la pathologie. Si vous avez des problèmes d'accès aux soins ou vous êtes dans une situation sociale compliquée, le service social se déplace ou vous avez des rendez-vous avec le service social. Si vous avez un problème avec les prestataires de soins, parce qu'il y a une surfacturation, parce qu'il y a eu une faute médicale, il y a toute la défense des membres qui se met en place. Donc, vous voyez, il y a une proximité et il y a véritablement, dans l'intérêt des membres cette volonté de les accompagner. 

MARIANNE : Alors, je voudrais aussi revenir sur un point dont on a parlé au début de ce podcast, qui est la casquette de cogestionnaire du système de santé. C'est un rôle qui est aussi vraiment beaucoup moins connu de la part des citoyens. 

XAVIER BRENEZ : Oui, c'est assez peu connu de tout ce que les mutualités font en fait dans le système. Et pour faire évoluer les droits et les remboursements, il faut savoir que les mutuelles sont présentes dans plus de 150 commissions, que ce soit au niveau fédéral, régional, et même européen. Elles viennent évidemment avec leur casquette de défense de membre. Ce qui est vraiment notre ADN. C'est-à-dire veiller à ce que l'évolution du système couvre les risques et les besoins les plus importants. Mais elles ont un rôle important aussi pour garantir l'efficacité du système, de veiller à ce que chaque euro investi vraiment contribue à la santé. 

MARIANNE : Est ce que ce sont les mutuelles qui vont par exemple négocier les tarifs ? 

XAVIER BRENEZ : Les mutuelles vont d'abord participer au processus d'élaboration du budget des soins de santé avec les prestataires. C'est toujours une collaboration avec les prestataires. Et puis, dans les différentes commissions, qu'est-ce qu'on va faire ? Effectivement, on va définir les tarifs officiels, les nouveaux remboursements, des nouveaux droits, toute une série de dispositions dans un système de concertation. Et ça, c'est important parce que c'est quand même dans l'ADN de la société belge. C'est ce système de concertation qui, parfois, est critiqué parce qu'il est lent. C'est vrai que c'est une certaine lenteur, mais ça permet de pouvoir utiliser les expertises de tous, mutualités et prestataires, et de venir aussi avec des mesures qui sont vraiment supportées par le terrain et donc qui aussi correspondent aux besoins de la population. Un autre rôle qu'on a aussi et qui est moins connu c'est tout ce qu'on fait pour essayer de simplifier le système. Alex a parlé de ce qu'on fait au niveau des mutualités individuelles. En collectif, on est à l'initiative de nombreux projets pour simplifier toute l'administration. Donc, par exemple, quand vous allez chez le médecin, maintenant chez le généraliste, vous ne devez plus rentrer votre attestation de soins à la mutualité pour un remboursement. Le remboursement se fait de manière automatique. Demain, vous ne devrez plus rentrer votre certificat en cas d'incapacité de travail parce qu'il sera aussi transmis directement du médecin vers la mutuelle. Donc ce sont des initiatives qui sont prises par les mutualités depuis de nombreuses années pour essayer de faire en sorte de simplifier au maximum l'administration liée à la santé.

MARIANNE : Pour simplifier aussi encore la vie des citoyens. J'imagine qu'il y a encore de nombreux défis. Donc pas besoin de boule de cristal pour savoir que les mutualités devront jongler avec plein de nouveaux défis dans l'avenir. C'est lesquelles pour vous deux ? 

ALEX PARISEL : Comme on est un corps intermédiaire entre l'État et la santé publique et de l'autre côté, le citoyen et son vécu quotidien, nous sommes directement confrontés à tous les défis sociétaux qui touchent à la  santé, que ce soit le vieillissement, l'évolution des maladies chroniques, que ce soit l'incapacité de travail, la précarisation de certaines populations, puisqu'on sait que les déterminants de la pauvreté sont souvent déterminants de la non-santé, les défis par rapport à la santé mentale, la fracture numérique. Et donc, si la santé est un enjeu sociétal majeur, nous sommes au cœur de ces défis pour tenter de les atténuer, d'atténuer le choc de ces défis et d'accompagner au mieux les membres par rapport à ces défis. Et, en fait, ça nous oblige à être en permanence dans l'adaptation, l'adaptation par rapport à la santé publique, par rapport aux évolutions réglementaires, par rapport à l'évolution de la technologie, par rapport aux attentes des citoyens. Et donc on est en permanence dans de la résilience, dans de l'adaptation et dans de l'innovation. On est très loin de l'organisme technocratique qui fait du remboursement et qui paye des revenus de remplacement. 

MARIANNE : C'est un peu ça, Xavier, on est obligé d'évoluer ? 

XAVIER BRENEZ : Oui, bien sûr. La société évolue, les soins de santé évoluent, les besoins évoluent, la technologie médicale évolue donc pour nous aussi avec notre casquette de cogestionnaires, avec des besoins qui sont de plus en plus importants, mais des marges budgétaires qui sont limitées, c'est d'essayer de trouver, avec l'ensemble des acteurs donc les administrations, les autorités, les prestataires, des marges, pour pouvoir investir dans de nouveaux remboursements, et de faciliter l'accès notamment à des médicaments innovants, aux nouvelles technologies médicales. Et donc ça, c'est un challenge important. C'est pour ça qu'on a un service d'études aussi qui travaille beaucoup et qui est force de propositions. Et puis on a aussi un fléau, je dirais, qui est galopant, c'est la question des malades de longue durée, puisqu'on a dépassé le demi-million de malades de longue durée en Belgique. On voit que c'est une croissance de quasiment 6 à 7 % par an. C'est le reflet d'une société complexe, le reflet de l'évolution des pathologies, du cumul d'une pathologie avec le travail. Et donc là, nous avons vraiment aussi un rôle important pour accompagner ces personnes et essayer de faire en sorte qu'on puisse utiliser leurs capacités restantes pour retrouver un travail adapté. 

MARIANNE : Merci. Alors ce sont bien sûr des évolutions qu'on va suivre et qu'on suivra aussi dans ce podcast. On arrive ici au terme de notre émission, donc merci beaucoup Alex. Merci beaucoup Xavier. 

XAVIER BRENEZ : Avec plaisir. 

MARIANNE : Ce qu'on retient aujourd'hui, c'est surtout que les mutualités, ce n'est pas juste une couverture santé, mais un pilier vraiment du système de solidarité. Un pilier qui accompagne les citoyens pour leur bien-être, pour l'accès aux soins et aussi pour la prévention santé, avec un rôle clé dans la concertation sociale. Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à commenter ce podcast et à lui attribuer une note. Et si vous voulez explorer d'autres sujets avec nous, retrouvez la série sur toutes les plateformes d'écoute. Merci à vous d'avoir été avec nous et à très bientôt. 

[Conclusion sonore]