Plus il y a de trafic, plus les concentrations de dioxyde d'azote (NO2) sont élevées. C'est l'une des conclusions de CurieuzenAir, un projet de participation citoyenne dans le cadre duquel la qualité de l'air dans la région de Bruxelles-Capitale a été analysée à l’aide de 3.000 points de mesure. Si l'on compare les nouvelles mesures avec celles du passé, il est clair que la qualité de l'air à Bruxelles ne cesse de s'améliorer. Mais il reste du pain sur la planche, surtout depuis que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a renforcé ses normes de qualité de l'air en 2021.

La réduction des effets de la pollution environnementale sur notre santé est l'une des grandes priorités de la santé publique et des soins de santé, selon les Mutualités Libres. Chaque année, 400.000 personnes en Europe décèdent prématurément en raison de la mauvaise qualité de l'air (avec des polluants tels que le NO2).

C'est pourquoi les Mutualités Libres ont pris part à CurieuzenAir en tant que point de mesure. Nous pouvons pousser un soupir de soulagement, car la concentration de NO2 autour des bureaux d'Anderlecht s'avère être bonne (14,89 microgrammes/m³). Les autres points de mesure situés dans la périphérie de la Région de Bruxelles-Capitale obtiennent également de bons résultats. La situation est différente dans le centre de Bruxelles, où des pics ont été observés jusqu'à 60,51 microgrammes/m³, ce qui est bien supérieur à la limite de 40 microgrammes/m³ actuellement en vigueur au sein de l'UE.

Plus de trafic = moins bonne qualité de l'air

Le trafic est la principale source de NO2. Il n'est donc pas surprenant que la concentration augmente à mesure que l'on se rapproche du centre de Bruxelles, où le trafic est plus élevé. Plusieurs endroits le long de la Petite Ceinture obtiennent donc des résultats particulièrement mauvais.

De plus, il apparaît que les quartiers les plus pauvres de Bruxelles obtiennent de moins bons résultats, de même que les quartiers à forte densité de population. Cela est dû en partie à l'effet canyon, où l'air pollué reste plus longtemps dans l’air en raison de la hauteur des bâtiments. Le meilleur air est mesuré dans le sud et l'est de la région, plus riches et plus résidentiels. En matière de qualité de l'air également, on peut donc parler d'inégalité en matière de santé, ce qui est inacceptable.

Les chercheurs notent que la qualité de l'air s'est améliorée au cours des dernières années (voir la figure ci-dessous). Ce résultat a été principalement obtenu grâce à la réduction du trafic automobile et à la mise en place d'une zone à faibles émissions (ZFE) à Bruxelles depuis 2018, qui exclut les voitures les plus polluantes.

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Mais il reste du pain sur la planche. Avec les normes européennes actuelles en matière de qualité de l'air, plusieurs endroits de Bruxelles obtiennent encore de mauvais scores. Entre-temps, l'OMS a publié de nouvelles normes de qualité de l'air (plus strictes), ce qui signifie que nous avons encore beaucoup à faire.

Nouvelles normes de l'OMS

En septembre 2021, l'OMS a renforcé les directives relatives à la qualité de l'air. Les modifications les plus saisissantes concernent les normes plus strictes pour le dioxyde d'azote (4 fois plus strictes) et les particules fines (2 fois plus strictes). L'OMS recommande une limite de 10 microgrammes/m³ pour le NO2, alors que la limite actuelle dans l'UE est de 40 microgrammes/m³. Si l'on appliquait cette nouvelle limite aux résultats de CurieuzenAir, plus de 98 % des Bruxellois seraient exposés à des concentrations de NO2 supérieures à la nouvelle norme de l'OMS.

Selon l'OMS, la lutte contre la pollution atmosphérique est un choix politique, car les preuves scientifiques sont irréfutables. Ces nouvelles directives constituent un premier pas important pour l'Union européenne. La réglementation européenne en matière de qualité de l'air sera révisée dans les prochains mois ; une consultation publique vient d’être publiée. Les Mutualités Libres appellent donc les autorités belges à défendre l'implémentation des nouvelles normes de l'OMS au niveau européen.

Une étude récente des Mutualités Libres révèle à quel point la pollution de l’air rend les Belges malades aujourd'hui. Lors des pics de pollution atmosphérique, les patients chroniques consultent plus rapidement leur médecin généraliste. En outre, cette pollution de l’air semble être l’un des facteurs qui contribuent à ce qu’une personne se retrouve en incapacité de travail pour des problèmes mentaux. L'impact sur notre santé n’est donc pas le seul à considérer, il faut aussi penser aux conséquences sur la viabilité financière de l'assurance maladie et invalidité belge. Une raison suffisante pour passer à l’action.

Ville saine

Selon Xavier Brenez, directeur général des Mutualités Libres, la qualité de l'air reste un dossier prioritaire pour Bruxelles : "Bruxelles doit continuer à travailler à une politique respectueuse de l'environnement. Le bénéfice est double : vous réduisez la pollution atmosphérique et, en multipliant les pistes cyclables et les zones vertes, vous encouragez les gens à faire plus d'exercice".

Le gouvernement bruxellois a déjà pris des mesures ces dernières années pour améliorer la qualité de l'air et réduire l'utilisation de la voiture, par exemple, la prime Bruxell'Air pour laisser tomber la voiture, ou le projet "Renolution" pour promouvoir les rénovations respectueuses de l'environnement et ainsi réduire les émissions de particules fines. Mais des efforts supplémentaires restent nécessaires, surtout si les nouvelles normes de l'OMS devaient être appliquées. Selon les nouveaux calculs d'ISGlobal, 433 décès prématurés par an pourraient être évités à Bruxelles si la nouvelle norme de l'OMS pour le dioxyde d'azote était appliquée (par comparaison, seuls 18 décès prématurés sont évités avec les anciennes normes de l'OMS de 2005).

Quelles sont les bases fondamentales pour œuvrer à l'amélioration de la qualité de l'air dans des villes comme Bruxelles ? Pour être une "healthy city", il faut mettre l’accent sur les éléments suivants :

  • Des villes pour les gens : rendons les villes et leurs espaces publics aux citoyens - réduire le trafic et l'utilisation de la voiture permettra d’améliorer la santé, la productivité, la qualité de vie urbaine et l'économie.
  • La marche et le vélo : octroyez plus d'espace aux piétons et aux cyclistes. Avec un bénéfice direct  pour la santé grâce à l'activité physique et une réduction de la pollution.
  • Les transports en commun : la ville saine de demain a besoin de transports publics fiables, abordables et durables.
  • Les espaces verts : les espaces verts urbains peuvent améliorer la santé mentale et physique et réduire la morbidité et la mortalité de plusieurs manières. Pour ce faire, les villes doivent agrandir les parcs ainsi que les espaces verts et sauvages et donner la possibilité à tous les groupes d'âge d'en profiter.

En 2022, les Mutualités Libres continueront à travailler sur la problématique de la pollution atmosphérique (notamment avec de nouvelles études) et à sensibiliser les autorités compétentes aux niveaux européen, fédéral et régional. C'est pourquoi les Mutualités Libres faisaient partie des signataires d'une lettre adressée à la Commission européenne, l'exhortant à implémenter les nouvelles normes de l'OMS sur la qualité de l'air d'ici 2030 au plus tard.