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Environnement

Valoriser la solidarité intergénérationnelle

Il y a plus de 2.000 ans, Socrate se plaignait déjà de la jeunesse. Les conflits de générations ne datent pas d’hier. Pourtant, jeunes et moins jeunes ont besoin les uns des autres pour apprendre à vivre... "Lors de la pandémie de Covid, cette solidarité entre générations a souvent été présentée sous un angle assez étroit", explique Philippe Noens, professeur en Sciences de la famille à la Haute Ecole Odisee.

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Valoriser la solidarité intergénérationnelle

Les jeunes contre les vieux

"Les enfants sont les messages vivants que nous envoyons à une époque que nous-mêmes ne connaîtrons pas". Cette citation du sociologue culturel américain Neil Postman souligne l'importance de la solidarité entre les générations. L'ancienne génération transmet la vie, la nouvelle génération espère en faire quelque chose d'intéressant. Pour qu'une société s'épanouisse, il faut que jeunes et vieux soient en contact de manière approfondie. Ce n'est qu'à ce moment-là que nous pourrons apprendre à nous apprécier et à vivre ensemble. Philippe Noens, professeur en Sciences de la famille à la Haute Ecole Odisee et chercheur au Centre de connaissances des sciences de la famille, a trouvé inquiétant que la solidarité ait été abordée de manière unilatérale lors de la pandémie de Covid. "Au début de la pandémie, la solidarité était principalement comprise en termes de comportement : des règles étaient établies et chacun devait s’adapter. C'était le seul moyen d'empêcher les personnes âgées et vulnérables d'être infectées et de maîtriser la pression sur le système de santé. Cette logique, bien que compréhensible, encourageait à penser en noir et blanc", explique Philippe Noens. "D'un côté, vous aviez les jeunes, représentés comme la génération qui s'est 'mal comportée', qui ne respectait pas les accords. On a mis en avant des histoires de jeunes qui se réunissaient sur les plages de Knokke-Heist ou qui organisaient des fêtes dans leur kot. Il a donc semblé pendant tout un temps que les ‘jeunes’ n'avaient pas compris le message et n'étaient pas assez solidaires avec la génération plus âgée. De l’autre côté, les personnes âgées étaient présentées comme isolées, enfermées dans les centres de soins résidentiels. Personne ne doute que nous aurions pu et dû faire davantage pour nos ainés. Mais en présentant les jeunes comme les ‘responsables’ de la circulation du virus et les personnes âgées comme les ‘victimes’ de ce comportement irresponsable, les médias ont involontairement creuser un gouffre entre les générations." Philippe Noens en est sûr : ce type de cadrage ne reflète pas la réalité. Nous ne devrions pas considérer les générations de manière aussi binaire.

Apprendre des baby-boomers

Il suffit de penser à la génération du baby-boom. Ces nouveaux pensionnés sont souvent présentés comme des gens qui profitent de la vie : ils restent très actifs, voyagent, s'inscrivent à des ateliers, s'occupent régulièrement de leurs petits-enfants, ont parfois une résidence secondaire... "Je pense toutefois que cette nouvelle génération de pensionnés reçoit le mauvais message", estime Philippe Noens. "La vie ne se résume pas au seul plaisir. En raison de leur expérience de vie, ces personnes ont une tâche importante : soutenir et guider les générations qui leur succèdent. Après tout, ils disposent d’un savoir incarné. Ils ont acquis une expérience et des connaissances qui font défaut à la jeune génération, tout simplement parce qu'ils ont vécu plus longtemps et ont connu plus de choses. Les jeunes d'une vingtaine d'années, par exemple, pensent que leur emploi sera en adéquation avec leur diplôme. Les personnes plus âgées peuvent nuancer ce point de vue - la carrière de tout un chacun rebondit souvent de manière inattendue. Pour reprendre une boutade bien connue : les jeunes n'ont pas toute la sagesse, elle vient avec les années. Il appartient donc aux plus âgés de s'amuser un peu moins, de partager et de transmettre leurs connaissances et leurs compétences - le savoir-faire qu’ils ont accumulé au fil des années."

Granny’s finest

L'UNESCO parle de "trésors humains vivants" et encourage les pays à prendre des initiatives qui contribuent à la préservation de ces trésors vivants (et de leurs connaissances). Comme, par exemple, les pêcheurs à cheval d'Oostduinkerke, qui possèdent un haut niveau de connaissances et de compétences et qui préservent le patrimoine culturel immatériel. "Il est important que ces connaissances, mais aussi cette tradition, soient transmises", souligne Philippe Noens. Aux Pays-Bas, il existe par exemple le projet ‘Granny's Finest’. Des jeunes qui s'intéressent à la mode travaillent avec des mamies tricoteuses. Ces grands-mères ont les techniques pour confectionner les vêtements tandis que la jeune génération connaît les tendances actuelles et les outils adéquats pour le marketing. Ces deux générations se rencontrent donc régulièrement et apprennent l'une de l'autre. »

Solidarité intergénérationnelle

Le contact et la compréhension mutuelle entre les générations sont nécessaires pour construire la solidarité intergénérationnelle. Les générations plus âgées ont également un rôle important à jouer en transmettant aux plus jeunes ce qu'elles savent, ce qu'elles peuvent faire et ce qu'elles pensent. Comment aborder au mieux cette question en tant que société ? Philippe Noens : "Un rôle important est réservé aux autorités... La politique peut, par exemple, développer des sites d'habitation où plusieurs générations cohabitent. Des kots dans les maisons de repos, une crèche au rez-de-chaussée d'un centre de soins résidentiels. Les contacts peuvent s’établir naturellement lorsque le cadre de vie des jeunes et moins jeunes se complète de manière adéquate. Pourquoi ne pas installer les jardins d’un quartier de logements sociaux, où vivent de nombreuses personnes âgées, à côté de la cour de récréation de l'école locale ? Cela permettrait d’encourager les contacts intergénérationnels." En tant que pédagogue, Philippe Noens et ses étudiants examinent comment aménager différemment les salles d'attente des centres médicaux afin de faciliter ces contacts intergénérationnels. "Nous cherchons des façons d’aménager les salles d'attente pour qu'elles stimulent le contact, sans que cela devienne moralisateur. Vous seriez surpris, par exemple, de constater que de nombreuses affiches d'information représentent encore principalement des femmes et des mères. Et en plus du coin traditionnellement réservé aux jeux, on pourrait aussi imaginer installer une table ronde dans la salle d’attente. En réalité, la disposition d'une pièce peut à elle seule bloquer ou stimuler l'interaction."

Jeunes et environnement

Quand on parle de solidarité entre générations, on ne peut que tourner nos regards vers la problématique environnementale, qui touche les jeunes en premier lieu. Ils ont d'ailleurs été au premier plan pour alerter l'opinion publique sur le climat. Ils sont aussi concernés par l'impact des substances chimiques sur leur santé. A cet égard, le tout premier projet de plan d'action national belge sur les perturbateurs endocriniens constitue une étape importante vers une meilleure identification et une meilleure protection de la santé contre les risques liés à l'exposition à ces substances nocives. 

youthforclimate.be

 

Un plan salué par les Mutualités Libres : "Le plan d'action national belge sur les perturbateurs endocriniens (PE) arrive à point nommé : un nombre croissant de Belges s'inquiètent de l'impact de ces substances sur la santé publique. En tant que mutualité, nous espérons pouvoir contribuer à la mise en œuvre de ce plan."